Chroniques du CD Invitations - Marc Perez


Claude Oberg « Jazz Critic »

Chroniqueur à Jazz Magazine de 1964 à 2007

Collaborateur du dictionnaire du Jazz Laffont / Bouquins

 

A l'évidence, les invitations lancées par Marc Perez ne concernaient que du beau monde, puisque sont ici réunis quelques uns des meilleurs jazzmen hexagonaux. En résulte cet album réussi, tout au long duquel les protagonistes, en toute complicité et vraiment entre amis , s'en donnent à coeur joie. A l'excellent quartet de Marc ( avec Freddy Ricci, Gilles Cardon, Gérald Moniez ) se joignent, au fil des plages, les guitaristes Jean-Paul Florens, Michel Perez , Marc Fosset, le saxophoniste David Gache et le trompettiste François Chassagnite. Que du beau monde, vous dis-je ! A partir d'un répertoire uniquement composé d'originaux joliment ecris par le leader, chacun, avec une aisance et un lyrisme admirables, signe des improvisations toujours inspirées et rigoureusement construites. Mention spéciale à deux titres : l'un dédié à Django Reinhardt ( I remember Django ), l'occasion pour Marc Fosset de se souvenir de Didi Duprat, dont l'écoute d'un disque, en tant qu'accompagnateur d'Yves Montand, décida sa vocation de guitariste ... gaucher comme son modèle; l'autre à Chet Baker ( Salut Chet ), évocation fidèle et chargée d'émotion du grand trompettiste ,par François Chassagnite. Rien à ajouter, si ce n'est ce conseil : offrez vous sans tarder ce scintillant joyau musical !

 

Yves Dorison : culturejazz.net

 

Le jazz, de nos jours, s’habille de couleurs multiples, toutes issues de genres musicaux différents. Il est donc une musique transversale, comme un pont qui relierait entres elles les îles d’un archipel à la taille de la planète. C’est là toute sa beauté. Mais le patchwork est hétérogène et bien des gens ne s’y retrouvent que peu ou pas. Ce doit être le cas des médias. Ils ont néanmoins une  réponse à l’angoissante  question qui les tarabuste , " Qu’est-ce que le jazz ? ". Ils l’ignorent. C’est imparable. Hélas, les musiciens qui voudraient en vivre se trouvent fort isolés. Ils ont beau perpétrer leur ouvrage à la manière de fourmis qui ne lachent rien, on les prend pour des cigales, des dilettantes qui n’aiment pas travailler plus. Pourtant, ils gagnent à être connus, reconnus, car ils ont la particularité attachante de réjouir les gens qui les écoutent. Ils ont une présence, une proximité avec leur public, qui génèrent la sympathie. On leur parle, rendez-vous compte ! Ils répondent (c’est un comble). Bref, ils sont humains et cela, c’est, au minimum, un danger d’une dangerosité dangereusement dangereuse.

Tout ceci me vient à l’esprit en écoutant le dernier disque du quartet de Marc Perez (Freddy Ricci, Gilles Cardon, Gérald Monnier et Marc Perez), " Invitations ", lequel est pour l’occasion accompagné d’amis : Michel Perez, Marc Fosset, David Gache, François Chassagnite, Jean-Paul Florens.

Je vous l’avoue sans ambage, c’est la présence du trop rare Michel Perez qui m’a convaincu d’écouter ce disque et de découvrir d’autres musiciens dont certains m’étaient même, à ce jour, absolument inconnus, honte à moi ! Marc Perez et acolytes font du jazz, ce genre de musique que l’on nommait ainsi il y a quelques décennies. Quelques mesures du premier morceau et l’on se souvient qu’on a dans la cédéthèque quelques enregistrements de Herb Ellis, Barney Kessel, Remo Palmieri, Cal Collins, Kenny Burrell, Charlie Byrd qui sont remarquables... Et voilà que la bande à Marc Perez nous immerge dans cette onde sonore ancienne que l’on oublie malgré nous à force de nouveautés.

Vous me direz que tout cela date un peu, que c’est du déjà fait et refait, n’est-ce pas. Eh bien, laissez-moi vous répondre que, sauf votre respect, cela reste frais comme au premier jour. C’est simple (enfin presque), c’est bon, en terrasse à Rome ou devant l’âtre un soir d’hiver... Standards ou compositions originales comme dans cet album, cette musique-là est pérenne. Elles se jouent entre amis, dans ces lieux où l’on pouvait, il y a peu, tirer sur un mégot en buvant un verre. De plus, elle n’empêche pas d’écouter John Zorn ou Wayne Shorter, Debussy ou les gnawa. Et aucun d’eux ne prendra ombrage si vous l’écoutez. Alors ?

 

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